mercredi 22 mai 2013

Savage Worlds : portrait de famille (1/2)

Suite à notre dernier article consacré à Savage Worlds voici quelques critiques succinctes qui vont essayer de faire le tour des univers et scénarios publiés par des éditeurs tiers.

N'oubliez pas que j'ai lu ces ouvrages mais je n'y ai pas forcément joué et parfois un univers (ou un scénario) peu inspirant à la lecture peut se révéler très efficace en partie. Inversement : un coup de cœur à la lecture peut tourner au calvaire autour d'une table. Gardez cela en tête quand vous lirez ce billet. Je ne suis pas infaillible et nos goûts diffèrent sans doute.

12 to Midnight : des scénarios qui font peur

12 to Midnight s'est spécialisé dans les scénarios d'horreur. Ils ont ainsi développé un setting maison : Pinebox, une petite ville du Texas (vivement une VF avec Boitenpin, petite ville des Ardennes). La plupart des scénarios disponibles (huit à ce jour) se déroulent donc dans cette petite bourgade du Texas, à notre époque. A se demander pourquoi l'ensemble des habitants n'a pas finit par déménager. Plaisanteries mise à part la plupart des scénarios de 12 to Midnight sont assez laids et ne m'ont pas vraiment convaincu.


Dans Skinwalker par exemple l'implication des personnages est vraiment tirée par les cheveux ("on a trouvé un cadavre dans la forêt, on devrait mener l'enquête !") et le méchant n'est pas franchement convaincant ("un vieux shaman m'a appris des trucs terribles et j'ai suivit une formation de méchant niv.2 en Irlande"). C'est dommage car l'aventure est plutôt bien organisée pour le MJ et assez ouverte mais l'histoire générale m'a laissé complètement froid. Last Rites of the Black Guard est un peu plus convaincant au départ avec une histoire de fantôme, un ancien complot nazi... Mais là aussi j'ai finit par lâcher prise assez rapidement, le côté chasse aux fantômes n'étant guère convaincant à mon goût et le final est assez décevant.

Deux choses sont à prendre en compte : la première est la facilité avec laquelle on peut adapter à peu près n'importe quel scénario à Savage Worlds et la deuxième est la quantité d'excellents scénarios d'horreur que l'on peut trouver dans d'autres gammes (comme Invasive Procedures pour Fear Itself ou la plupart des scénarios de l'Appel de Cthulhu). Donc si vous voulez de l'horreur pour Savage Worlds je vous dirais d'aller piocher ailleurs et d'adapter le scénario choisi à la volée.

A noter que Fear Effects est un livret de 11 pages dédié aux règles de peur et de folie qui ne valent pas le détour, les règles de Peur de Savage Worlds fonctionnent déjà très bien et si vous souhaitez approfondir le sujet l'Horror Companion vous sera bien plus utile.

Adamant Entertainment : du pulp et encore du pulp

 Adamant Entertainment propose aux Sauvageons sa vision de Mars :


Mars

Je suis un très gros fan de John Carter de Mars (les romans et l'ambiance visuelle du film) et j'aime beaucoup Savage Worlds. Alors forcément j'attendais Mars au tournant. Et malheureusement j'ai été déçu. Pas que l'ouvrage soit mauvais, loin de là, mais il ne correspond pas à ma vision de ce type d'univers. Déjà le livre n'est quand même pas très beau et les illustrations ne m'ont pas semblées très évocatrices. En dehors de ça l'ouvrage est très complet : une histoire de Mars, une présentation de ses différents peuples (martiens à quatre bras, singes blancs, hommes synthétiques...), de l'équipement, un bestiaire et un gros scénario (25 pages). Le cahier des charges pour un bon supplément d'univers pour Savage Worlds est donc respecté. Mais je trouve que l'ensemble manque du souffle épique des romans qui l'ont inspiré. C'est un travail de bon élève mais, à mon sens, sans imagination. Encore plus que pour les autres univers je vous conseille de vous faire votre propre avis en lisant d'autres critiques de ce livre : ici, ici ou encore une vidéo.


Thrilling Tales 2nd Edition

Cet ouvrage commence par un assez bon historique des genres associés à la littérature "Pulp" et est suivi par une chronologie des années 30. Le passage sur l'équipement est fort sympathique car illustré par des photos d'époque : armes, voitures, avions... Viennent ensuite des descriptions de divers groupes de méchants assez complète (historique, PNJ type, amorces d'aventure...) avec au menu : les nazis, les assassin thugs, et l'orient mystérieux (les Ninjas, les triades, les méchants à la Fu Manchu...). L'ensemble s'achève sur une campagne divisée en 5 grands chapitres fort sympathique avec tout ce qu'il faut de conspirations et de nazis pour satisfaire un groupe de joueurs fans de Pulp. La maquette du livre est minimaliste et utilise beaucoup des dessins d'époques avec plus ou moins de bonheur.

Vous souhaitez mener quelques scénarios à la Indiana Jones pour assouvir votre besoin de Pulp ? Orientez-vous plutôt vers les Daring Tales of Adventure de Triple Ace Games. Si vous voulez faire votre propre sauce et bricoler votre propre campagne Thrilling Tales vous facilitera la tâche. Sinon je ferais la même critique que pour Mars : la lecture du livre ne m'as pas donné envie d'écrire immédiatement un scénario ou de créer un personnage. Le style est poussif et fait plus pensé à un article Wikipedia qu'à un livre de JDR. Mais c'est fonctionnel et les scénarios sont plaisants...

Atomic Overmind Press

 Cet éditeur a proposé à Kenneth Hite (auteur, entre autres, de Trail of Cthulhu) de créer un univers pour Savage Worlds, le résultat ?


 The Day After Raganarok

Day after Ragnarok fait partie de ces univers qui ne sont pas fait pour moi. Le style de Kenneth Hite est bien trop lourd pour du "pulp", la seule page d'introduction (Serpentfall) est un calvaire et ne pose pas de manière simple, claire et précise les tenants et les aboutissants de l'univers, alors qu'au bout du compte, ce n'est pas très compliqué :

Les nazis sont parvenus à invoquer Jörmungandr, le serpent des légendes nordiques, long de plusieurs milliers de kilomètres. Les alliés répliquent en lui collant une bombe atomique dans la tête. Résultat des courses ? Le corps d'un serpent géant s'est donc abattu sur le monde. Cette chute, accompagnée par le sang empoisonnée de la bête, a rayé plusieurs villes de la carte et transformée des régions entières du monde en no man's land.

On a donc une ambiance post-apocalyptique mais dans les années 50 avec une technologie fondée sur les restes du serpent (l'ophi-tech), des vilains communistes, quelques nazis qui trainent encore, des cultistes planqués dans les coins et j'ai vraiment eu envie d'aimer tout ça... Mais en ce qui me concerne je trouve plus d'inspiration dans n'importe épisode de Thundarr The Barbarian ou dans un n° de Kamandi que dans ces 130 pages. La prose ampoulée de Hite est aux antipodes des sources qu'il dit pourtant vouloir émuler (Robert E. Howard en tête).

Encore une fois, je n'ai pas la science infuse, je vous invite donc à consulter d'autres critiques sur cet ouvrage : ici, , ici ou encore . Pour résumer la plupart des gens aiment beaucoup, j'ai donc peut-être lu le livre dans un mauvais jour...

Daring entertainment : un zombie sinon rien

Daring Entertainment nous prépare peut-être un univers de super-héros mais ce sont des zombies qui ont fait le succès de cet éditeur :


War of the Dead

Je pense que la plupart des MJ ont mené au moins une fois une partie de JDR mettant en scène des zombies. On a même une gamme de jeu de rôle qui a décliné la plupart des genres possibles en y ajoutant des zombies (All Flesh Must Be Eaten). Toutefois je me suis souvent trouvé face à la même difficulté : je voyais bien comment faire un one-shot ou une très courte campagne sur le sujet. Mais mener une campagne au long cours sur le thème des zombies ? Je séchais très rapidement... C'est à ce moment là qu'arrive Daring Entertainement avec sa méga campagne (52 scénarios réparti sur quatre volumes !) : War of  the Dead qui est un peu le Walking Dead du jeu de rôle. L'auteur, Lee F. Szczepanik, Jr., nous donne l'opportunité de suivre un groupe de survivants (les personnages des joueurs) sur 52 semaines.

Difficile de se faire une idée avant de l'avoir jouer en totalité mais sur le papier l'ensemble est très prometteur. Comme dans Walking Dead les joueurs devront faire face à des décisions difficiles, des trahisons, des batailles rangées, des révélations sur l'origine des zombies... Garder une certaine cohérence sur une telle durée implique que beaucoup d'événements de la campagne soient scriptés. La marge de manœuvre des joueurs me semble pourtant assez importante, surtout à partir du volume 2. Cette campagne est à mon avis une véritable réussite et je n'ai qu'une seule hâte : la faire jouer !

Evil DM Productions

 Un seul univers Savage Worlds à l'actif de cet éditeur :


Legends of Steel

Legends of Steel est très court (70 pages) mais il est plutôt bien rempli. La maquette est minimaliste, les illustrations peu nombreuses,et l'auteur présente un univers de Sword & Sorcery volontairement caricatural mais efficace. Sa passion pour le genre est évidente et transparait à chaque page. Seul véritable problème pour Legends of Steel : la concurrence. Sur ce créneau des univers comme Beasts and Barbarians et Totems of The Dead (que l'on verra la semaine prochaine) font désormais beaucoup mieux : plus complets, plus inspirés et beaucoup mieux présentés. Legends of Steel reste un ouvrage des plus sympathique mais il n'intéressera plus que les fans hardcore de Sword & Sorcery qui veulent posséder tous les ouvrages sur le sujet.

FunSizedGames : jusqu'au bout de la nuit

 Cet éditeur propose pour l'instant un seul univers pour Savage Worlds :


Streets of Bedlam

Conçu par l'auteur de Little Fears, Jason L. Blair, Streets of Bedlam s'adresse aux fans de Sin City, des Boondock Saints ou de Max Payne. Sur plus de 250 pages l'auteur nous dresse donc un portrait d'une ville coupée en deux par une rivière avec d'un côté Lamrose, le quartier du crime et de l'autre Bedrock, la ville huppée mais pas moins corrompue. Mais l'auteur ne propose pas aux joueurs d'incarner des salauds :
You’re a person with a past and an aim to do good. [...] You right wrongs. You track down bad guys who are protected from on high, the men and women nobody else dares to touch. You hunt down the scum of the earth. You rescue the lost, protect the vulnerable, and shepherd the weak.
Ce n'est donc pas Grand Theft Auto le jdr (vous avez déjà Dogtown pour ça de toute manière). En plus d'une ville décrite dans ses grandes lignes (par le biais des lieux les plus importants) le jeu propose quelques variantes aux règles de Savage Worlds. Une idée assez intéressante proposée dans Streets of Bedlam et qui sera reprise dans Interface Zero 2.0 est l'utilisation d'archétype afin de faciliter la création de personnage d'un côté et surtout un bon moyen d'obtenir des PJ qui collent vraiment à l'univers du jeu. Vous avez un exemple d'archétype par ici. Le jeu en propose 15 en tout, du Monster (Marv dans Sin City ça vous dit quelque chose ?) au Hitter (Hitman me voilà) en passant par la Valkyrie (aka la péripatéticienne de combat). L'ouvrage propose également une nouvelle façon de gérer les dégâts, le principe des "rôles" que chaque PJ peut tenir au cours d'un scénario ("Hero", "Sidekick"...) et qui sont interchangeable d'un scénario à l'autre...

Beaucoup de règles dont l'intérêt ne pourra se voir qu'autour d'une table, je réserve donc mon jugement sur celles-ci pour l'instant. On tombe ensuite sur la description de plus de 200 PNJ et enfin un gros paquet de Savage Tales (scénario en 1 page) qui peuvent toutes être reliées les unes aux autres. Bref Streets of Bedlam est bien écrit, j'aime les illustrations (c'est l'artiste de la couverture qui s'en est chargé) et même si la présentation est spartiate la lecture du livre me donne envie de jouer.

GRAmel : du sang et de la sueur

Éditeur polonais de Savage Worlds, GRAmel a rapidement produit des univers maisons destinés au système. Deux d'entre eux sont désormais disponibles en anglais.


Beasts and Barbarians

L'univers de Beasts and Barbarians n'a rien de particulièrement original. Il y a des pseudo-celtes, des pseudos zoulous, des pseudos-mongols, des noms improbables (Zandor !), des barbares venus du nord... A priori un univers que n'importe quel bon fan de Sword & Sorcery serait capable de produire. Et vous savez quoi ? J'adore...

J'ai à peine refermé le livre que je voulais lancer une partie et voir Conan, Kwai Chang Caine et Bran Mak Morn partir à l'aventure, botter le cul du tyran local, éliminer une secte du dieu Serpent, faire face à des horreurs non-euclidiennes et finir dans une taverne pour raconter leurs exploits. Contrairement à ce que la couverture pourrait faire croire les illustrations du jeu sont d'excellentes qualités. La partie règles propose des Atouts et Défauts propre à cet univers, a priori assez bien vus, et adapte la magie de Savage Worlds à l'univers (avec des mangeurs de lotus, des sorciers et des illuminés) et le tout se conclut par un scénario assez bien ficelé.

L'auteur réussit à mon sens à communiquer sa passion pour la Sword & Sorcery et les illustrations font le reste. Savage Worlds m'a toujours paru être un excellent système pour ce genre d'univers et Beasts and Barbarians le démontre brillamment. En plus cette univers bénéficie d'un suivi conséquent et de qualité (un bestiaire/recueil de scénarios avec Beasts of the Dominions, une ville avec Jalizar, un supplément pour gérer les compagnies de mercenaires avec Tattered Banners, des aventures très réussies comme Green World ou Death of the Tyrant...).

Nemezis

Dans le futur, alors que l'humanité a essaimé sur des milliers de planètes, le dévoreur des mondes et toute une flopée de monstres Cthulhien (la Horde) déboule, prêt à mettre fin au genre humain. Mais il se trouve que dans le futur l'humanité peut compter sur des maitres d'armes psis, des guerriers mutants, des aventuriers de tout poil, un peu de courage et beaucoup d'armes à feu. L'ambiance visuelle du PDF m'a fait penser au jeu vidéo Mass Effect et l'univers décrit rappelle Cyberpunk, Mutant Chronicles, Mass Effect et quelques mangas comme Cyber City ou Venus Wars.

Ce n'est pas tout à fait du Space Opera car le voyage spatial n'est pas vraiment au programme, l'ouvrage détaillant en fait trois planètes (un monde cyberpunk mourant, Ash, un monde divisé entre cités flottantes et jungle, les deux étant pleines de prédateurs, financiers d'un côté, carnassiers de l'autre, Bariz, et enfin une planète champs de bataille ou l'humanité affronte la horde, Cor). Donc contrairement à ce que la couverture pourrait vous faire croire l'action du jeu ne se résume à casser de l'alien à tour de bras dans votre belle armure rouge.

Petit défaut à mes yeux, contrairement aux univers de Pinnacle Nemezis ne propose pas de campagne, même pas un scénario, juste un générateur d'aventures, construit sur le même modèle que celui de Beasts and Barbarians. Du coup je ne sais pas vraiment par quel bout prendre cet univers. Le fait que l'univers soit "limité" à trois planètes (et donc trois ambiances) évite toutefois au MJ d'être complètement perdu.

J'attends de voir le suivi de GRAmel pour cet univers avant de me faire une idée. Je trouve pour l'instant que l'écueil de l'univers Über-Dark tourné uniquement vers le conflit militaire (à la Necropolis) me semble évité. Autre regret la future édition papier sera en noir et blanc alors que le PDF démontre bien que la maquette a été pensée pour une impression couleur. Pour conclure je m'attendais à quelque chose de très fermé et bourrin alors que l'univers semble laissé pas mal de marge de manœuvre au MJ et aux joueurs. C'est pour l'instant l'univers de SF qui me semble le plus séduisant pour Savage Worlds (Slipstream étant un peu à part avec son côté très rétro).

Et la semaine prochaine ?

Pour la seconde moitié de ce billet nous parlerons de Gun Metal Games, Mophidius, Reality Blurs, Savage Mojo et Triple Ace Games.

1 commentaire:

childeric maximus a dit…

Merci pour cette revue de détail.
Je sais vers quoi tourner mes yeux à présent.